Fraichement rentrés du Panama, nous partageons notre périple sur les traces de Colomb et de Balboa découvrant après des semaines de marche, ce lac salé qui n’est autre que le Pacifique. Seule région des deux Amériques où la panaméricaine s’interrompt, nous nous enfonçons dans le Darien, sa jungle luxuriante et grouillante, à pied et en pirogue. Nous nous immergeons dans des villages indiens et nous réveillons dans nos hamacs comme aux premiers matins du monde. Entre narco-artisans et chercheurs d’or, nos sens sont en éveil dans des villages métis coupés du monde, où il règne une atmosphère sur laquelle le temps ne semble avoir de prise. Deux projets rares pour 2014 et 2015 ont germé dans nos esprits d’aventuriers…
Sur la Panaméricaine
Laissant Panama City et son canal, les magnifiques îles San Blas et les Kuna, nous partons tôt en voiture pour le Darien, à 5 heures de route à l’est de la capitale. Presque arrivés à destination, nous nous arrêtons à Filo del Tallo, village indien Wounaan à une demi-heure de taxi pick-up 4x4 de la route principale. Depuis Panama City, nous sommes en fait sur la Panaméricaine qui arrive du Costa-Rica à l’ouest et traverse le pays pour s’arrêter à quelques dizaines de kilomètres de là, à Yavisa. Des deux continents américains, entre Alaska et Ushuaia, c’est ici le seul endroit où la route mythique s’interrompt.
Parfum de bout du monde
A Yavisa, règne un parfum de bout du monde dans ce village métis où une petite garnison militaire assure la surveillance de trafics en tout genre, d’immigrés africains notamment venant du continent sud-américain et remontant vers les Etats-Unis, mais surtout de drogue.
Derrière le pont démarre un sentier qui permet de rejoindre la Colombie. Et entre nous et la frontière, la jungle peuplée d’une avifaune exceptionnelle, de nombreux singes hurleurs et de quelques serpents ! Elle est traversée par de nombreuses rivières où se prélassent sur leur berge quelques crocodiles. Dans cette forêt, le mode de transport privilégié est la pirogue. Encore un peu plus au sud, c’est Tucuti et ses chercheurs d’or. On y règle encore son whisky avec de la poudre d’or et les règlements de comptes restent hebdomadaires.
Il ne règne ici aucun sentiment d’insécurité. Tout le monde se connaît. Les quelques dizaines de touristes annuels que voit la région sont plutôt des attractions. Quelques règles de sécurité de bon sens s’appliquent naturellement, comme partout ailleurs dans le monde.
Au coeur des ténèbres !
Nous avons décidé de nous immerger dans un village Embera, à quelques heures de marche de Sambu, village métis. Nous passons non loin de La Palma, « capitale » du Darien au bord du Golfe San Miguel baigné par les eaux du Pacifique. Trois heures de pirogue jusqu’à Sambu puis quatre heures de marche dans la jungle pour atteindre Villa Kerecia où nous allons passer quelques nuits, en totale immersion avec les indiens.
Progressant lentement dans la jungle, freinés par les racines et les branches, les ronces et les toiles d’araignées, nous ne pouvons nous empêcher d’imaginer les Espagnols traversant cet environnement tellement hostile avec leurs armures de quelques dizaines de kilos. Nous imaginons Balboa qui, ayant laissé ses vaisseaux sur la côte Atlantique , goûte l’eau salée de ce lac dont il allait comprendre bien vite que c’était un autre océan, le Pacifique : une petite centaine de kilomètres les séparent… mais combien de jours de jungle avec des habitants à l’époque plutôt hostiles ?
En progressant dans le bruit incessant des oiseaux, singes et insectes, nous faisons quelques rencontres et observons cette nature brute : ici, une vipère fer de lance et là, une fourmilière sur un tronc auquel les indiens attachaient l’infortuné serviteur de la reine Isabelle, et dont on ne retrouvait que les os le lendemain.
Pourtant, le sentier qu’empruntent les indiens du village est assez bien tracé et notre progression est commode. La machette de notre guide Embera nous aide bien. Grands s’abstenir, il ne coupe pas au dessus du mètre quatre-vingts ! La boue colle à nos bottes qui s’enfoncent parfois de 40 ou 50 cm. On a vite fait de les y laisser et de continuer en chaussettes.
En immersion chez les Embera
A la différence de nombreux villages que nous avons vus jusque là, Villa Kerecia est dépourvu d’électricité. Les indiens ont gardé une authenticité sincère tout en étant totalement informés de l’évolution du monde. Sambu n’est qu’à une heure de pirogue et les échanges sont nombreux. Les adolescents y font leur scolarité.
Leur mode de vie est principalement fondé sur la chasse, la pêche et la cueillette, un peu d’agriculture également. Les femmes sont pour certaines seins nus, d’autres portent un tshirt. Elles disposent autour de leur taille d’un paruma, tunique indienne très colorée dont elles renouvellent leur collection tous les ans. Elles sont coquettes ! Un peu de dollars sont alors nécessaires. Les homems sont en bermuda et tshirt. Tous ici parlent espagnol, en plus de leur dialecte bien sûr.
Ce qui nous frappe le plus est cette douceur de vivre. Ce pays a réussi un métissage d’une rare richesse et à la différence de nombreux endroits des deux Amériques, ces indiens semblent avoir été traités avec plus d’intelligence. Cette terre d’une formidable richesse et la leur et personne ne la leur dispute.
Projets pour 2014 et après
Au sortir de cette expérience particulièrement forte où nous avons l’impression constante d’être seuls au monde à un siècle qui pourrait souvent être le seizième, nous envisageons avec Michel, notre partenaire et guide, deux projets uniques et exclusifs pour les deux ans qui viennent, qui promettent d’être exceptionnels : une expédition assez courte mais engagée dans l’esprit des conquistadors et une autre, semblable à celle-ci mais plus longue, en plus profonde immersion dans les méandres de la forêt chez les indiens et les chercheurs d’or.... A suivre dans nos prochaines newsletters et, si nous mettons les détails au point rapidement, dans notre prochain catalogue….