26 avril 2023 - Faune
Gorille des montagnes en Ouganda

Sans conteste, le gorille est associé à la force. Ce n’est pas sans raison, qu’il s’agisse du nom donné à ceux qui protègent les personnalités, ou filtrent les entrées des boîtes de nuit. Le gorille, c’est aussi King Kong, capable de jeter au sol les avions depuis le sommet de l’Empire State Building. Le gorille pourtant, c’est surtout la force tranquille. Un animal fascinant dont les médias parlent souvent. Il est présent en Ouganda notamment. Une destination où les voyageurs partent cet été encore à sa rencontre. L’occasion d’évoquer cet animal fascinant.

 

Le plus grand des primates

Pour commencer, le gorille est un grand singe. Les grands singes appartiennent à la super famille des hominoïdes, elle-même divisée en deux lignées distinctes. C’est dans la première, celle des hominidés que nous nous trouvons nous les hommes, aux côtés des chimpanzés et bonobos, et bien sûr aussi des gorilles, aux origines africaines. S’y trouvent également les orangs-outans, la seule espèce présente sur le continent asiatique et appartenant à la famille des pongidés. Dans la seconde lignée enfin, les hylobatidés avec comme représentant les gibbons.

Parmi les gorilles, deux espèces. Ceux de l’Ouest (Gorilla gorilla) avec deux sous-espèces : les gorilles des plaines occidentales (Gorilla gorilla gorilla), et les gorilles de la rivière Cross (Gorilla gorilla diehli). À leurs côtés, les gorilles de l’Est (Gorilla beringei) avec la sous-espèce des plaines orientales (Gorilla beringei graueri) et enfin, bien sûr, les gorilles des montagnes (Gorilla beringei beringei).

Ces derniers, mis en lumière dans le film Gorilles dans la brume, sont ceux dont nous partons à la rencontre lors de notre voyage en Ouganda. Ils résident dans les parcs nationaux de Bwindi et Mgahinga, mais aussi dans le massif des Virunga au Rwanda et de l’autre côté de la frontière en République démocratique du Congo.

Les gorilles des plaines occidentales sont de loin les plus représentés, avec une population pouvant dépasser les 350 000 individus. Un chiffre qui a pris son envol il y a maintenant cinq ans, résultant d’un travail mené durant plusieurs années et publié dans la revue Science Advances. Pour parvenir à ce résultat, les chercheurs ne se sont plus limités au comptage des nids fabriqués chaque soir par les gorilles, ils ont effectué des calculs prenant en compte les zones menant aux différents sites de présence avérés. 

À l’autre bout, les gorilles de la rivière Cross habitant des zones limitées du Nigéria et du Cameroun ne sont plus que 300, faisant d’eux le primate le plus menacé au monde.

Parc du Dja au Cameroun, habitat naturel du Gorille © Renaud Fulconis
Parc du Dja au Cameroun © Renaud Fulconis

 

Mieux connaître les gorilles des montagnes

Afin d’en simplifier la lecture, mais aussi parce que les gorilles des montagnes représentent l’espèce rencontrée lors de notre voyage en Ouganda, je propose de consacrer de l’espace à leur présentation. Cette sous-espèce est la mieux connue de toutes, parce que la plus étudiée. Les recherches à son sujet ont commencé avec le travail du biologiste américain Georges Schaller à la fin des années 50. En 1967, Diane Fossey venait renforcer, avant d’être abattu par des braconniers, les connaissances acquises par ses études dans son centre de recherche de Karisoke, dans les montagnes du Virunga, avec le suivi de groupes d’individus habitués à sa présence.

On ne les trouve qu’à des altitudes allant de 2200 mètres à 4 000 mètres, dans un environnement forestier avec un climat soumis à deux saisons des pluies et deux saisons sèches. Il existe peu de compétition alimentaire, tant les ressources sont disponibles et faciles d’accès. Ils sont folivores, et se nourrissent principalement de feuilles, de racines et de tiges, mais ne rechignent pas à consommer parfois de petits fruits. En raison de cette disponibilité alimentaire, ils vivent sur de petits territoires d’une superficie pouvant atteindre jusqu’à une quinzaine de kilomètres carrés. Le pelage des gorilles des montagnes est plus long et plus épais que celui des autres sous-espèces. Cela lui permet de faire face au climat souvent froid caractéristique de son habitat montagneux.


© Renaud Fulconis

Le dimorphisme sexuel est important. Les mâles sont bien plus grands et plus massifs que ne le sont les femelles. Un mâle peut peser 200 kilos et soulever une charge de 800 kilos. Cette force est parfois utilisée entre individus et l’agressivité n’est pas rare entre mâles, comme entre mâles et femelles. 

Quand les mâles atteignent une quinzaine d’années et leur maturité sexuelle, leur pelage vire au gris, voire au blanc, sur une partie de leur dos. Parmi eux, un mâle est le dominant du groupe, il en est le protecteur et le leader. Son groupe peut n’être composé que d’une femelle, mais peut dépasser une vingtaine d’individus.Le plus souvent, il est composé uniquement de femelles, avec une moyenne d’une petite dizaine d’individus. Les mâles restent dans leur groupe d’origine, et sont alors soumis à la dominance d’un dos argenté, ou passent une période seuls, avant de composer un groupe dont ils assurent la domination sur une ou plusieurs femelles ayant elles-mêmes quitté leur groupe d’origine.

L’infanticide est présent chez les gorilles, et survient quand les petits (jusqu’à trois ans) ne sont pas sous la protection d’un mâle. Les femelles accordent du temps à développer leurs relations avec les mâles pouvant assurer leur protection et protéger les petits contre l’agression d’autres mâles. Ces mâles « protecteurs » ne jouent pas de rôle dans l’éducation des petits, mais représentent cependant une figure d’attachement et de protection.

 

Pourquoi les gorilles se frappent-ils le torse ?

Edward Wright, primatologue à l’Institut Max Plank d’anthropologie évolutionniste, a travaillé avec ses collègues afin de tenter de percer les mystères de ce comportement surprenant. Leur conclusion est que les gorilles se frapperaient le torse afin de faire la démonstration de leur force, et aussi de « signal honnête relatif à leurs aptitudes concurrentielles ». Un avertissement dont l’ensemble des personnes en ayant été témoin ne peut douter.

 

Des menaces nombreuses

Si les gorilles concentrent des efforts de conservation conséquents de la part d’organisations non gouvernementales,ces efforts ne suffisent pas à enrayer les menaces qui pèsent sur ces grands singes, comme sur les autres.

Parmi elles, la déforestation bien sûr, car pas de chance, ce sont les milieux forestiers qui les abritent. Les conflits armés ensuite, dont l’étendue prend parfois les animaux en étaux, favorisent le braconnage. En effet, la viande des gorilles est consommée par les populations, étant parfois la seule source de protéines à leur disposition. Pas seulement malheureusement, car la viande de brousse rencontre également un véritable succès auprès de bien des personnes au sein des populations plus aisées, qui en apprécient le goût. Ainsi, les saisies douanières de viande de brousse dans les aéroports européens ne sont pas rares, résultat d’une demande d’individus habitués à en consommer.

Vendeuse de viande de brousse © Renaud Fulconis
Vendeuse de viande de brousse © Renaud Fulconis

Les gorilles sont aussi, comme nous, sujets aux maladies. La proximité avec les humains, braconniers, représentants des communautés locales, rangers ou même touristes, est une menace non négligeable. Des cas de décès par contraction de la fièvre Ebola ou de la gale ont notamment déjà été documentés. Certains gorilles vivant en captivité en parc zoologique aux États-Unis, ont par ailleurs été testés positifs au Coronavirus.

Dans les années 70, la population de gorilles de montagnes était tombée à 250. Le début des actions de conservation a été mis à mal avec les violences des années 90. Depuis, les trois pays qui les abritent ont adopté des mesures conséquentes pour inverser la tendance pouvant mener cette sous-espèce à l’extinction (voir la liste rouge d'IUCN). En 2015, la population était passée à 880 individus, puis à 1 063 en 2015. Côté rwandais, le parc abritant les gorilles va gagner en superficie d’ici 10 ans, relogeant et indemnisant les habitants devant quitter leurs terres. Ces derniers bénéficient également d’un pourcentage du prix des entrées. Enfin, leur rendre visite en compagnie d’une équipe locale est devenu bien plus coûteux et limité en temps et en nombre de touristes chaque jour.

Voir les gorilles des montagnes en Ouganda est une expérience mémorable que nos voyageurs ayant vécu l’expérience rapportent avec beaucoup d’émotions. Elle l’est d’autant plus que nos autres cousins, les chimpanzés, sont aussi au programme !

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