Trois thèmes principaux m'ont inspiré ce roman : mes voyages, la rencontre avec des rebelles Touareg et les évènements dramatiques de cette année, qui ont secoué le Mali et vu la victoire des Islamistes et l'imposition de la charia, enfin les risques que nous avons pris qui auraient pu nous coûter la vie. Sur cette actualité brûlante, j'ai repris mes carnets de voyage et j'ai greffé les personnages récurrents de mes précédents romans.
En 2009 et 2010, je suis retourné au Mali, cette fois pour y rencontrer des rebelles Touareg. Après de nombreux pourparlers, je n'ai pu voir que ceux qui s'étaient battu dans les années 80/90. Les autres ont tenu à rester dans l'ombre. Mais je n'ai pas perdu mon temps pour autant. J'ai eu le privilège de partager la vie d'un des plus célèbres : Ibrahim Ag Alhabib, le leader charismatique du groupe Tinariwen. Cet homme m'a fortement impressionné. D'abord, par l'excellence de sa musique, un mélange de blues, de rock et d'accents syncopés d'imzad. Après avoir guerroyé avec Kadhafi dans les années 80, il a préféré le combat psychologique, en troquant sa Kalash contre une guitare électrique. Mais de bons musiciens, on en trouve partout, y compris au Mali et si je n'avais pas vécu avec lui, je serais passé à côté d'un génie. Ce type est un clone de Baudelaire tant par sa personnalité d'écorché vif, sa poésie engagée, son goût pour la mélancolie et la solitude que par l'excès qu'il fait des paradis artificiels. Il a en plus une passion que Baudelaire n'avait pas : le combat politique. S'il donne des concerts dans tout le Sahara, c'est pour stimuler la révolte en chantant la détresse des Touareg. Son œuvre est un cri de souffrance auquel il est difficile d'être sourd. En l'écoutant de nombreux Touareg s'engagent dans la résistance. J'ai également rencontré deux opposants historiques au régime algérien qui eux aussi m'ont profondément marqué.
Et puis, en janvier 2012, la révolte touarègue a éclaté, suivie du coup d'état militaire qui a anéanti l'armée malienne, puis ce fut la victoire des Islamistes qui ont multiplié les prises d'otages, imposé la charia et plongé le Mali dans le chaos. Moi qui aime tant le peuple touareg, je ne pouvais pas résister à la tentation de dénoncer cette chienlit. Ce livre est aussi une sorte de requiem qui leur est dédié.
Enfin, nous avons, mon épouse et moi-même, vécu en 2009, une mésaventure liée à la rébellion, qui aurait pu nous coûter la vie. Je n'ai pas, non plus, pu résister à l'envie de la joindre à l'intrigue du roman.
Personne ne sait si le Mali pourra un jour retrouver la paix. L'intervention armée des pays de l'Afrique de l'Ouest rétablira peut-être une paix précaire, mais les problèmes de fond, qu'ils soient ethnologiques, économiques, politiques ou religieux demeureront et il est certain qu’un jour, la rébellion renaîtra engendrant une nouvelle guerre civile. Qui vivra, verra. Mais une chose est sûre : quelle que soit l'issue de la guerre qui se prépare, la misère sera encore plus insupportable pour les survivants et pour nous, voyageurs, cette partie du Sahara nous sera interdite pour longtemps.
Gilbert PETIT
Cet ouvrage est publié aux Éditions Hélène Jacob et son prix est de 2,99 € en version numérique et 14,90 € en version papier
Les droits d'auteurs seront consacrés à l'amélioration d'une école d'Agadez
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